UNIVERSITÉ DE SFAX

École Supérieure de Commerce

 

Année Universitaire 2003 / 2004

 

Auditoire : Troisième Année

Études Supérieures Commerciales & Sciences Comptables

 

DÉCISIONS FINANCIÈRES

 

Note de cours N° 2

 

Première Partie : La décision d’investissement

 

Chapitre 1 : La Notion d’Investissement

 

Enseignant :  Walid KHOUFI

 

1. Introduction

L’investissement est l’acte essentiel que doit contrôler le financier d’une entreprise.

       Pourquoi?

Le succès de cet acte, ou son échec est reflété dans la valeur de l’entreprise.

Une décision d’investissement est considérée bonne lorsqu’elle accroît la valeur de l’entreprise, donc la richesse des actionnaires. L’investissement doit donc rapporter plus qu’il ne coûte.

 

Investir consiste à engager aujourd’hui des fonds dans l’espoir de recevoir plus tard des flux monétaires dont la valeur actualisée excède la mise de fonds initiale.

 

2. Définition de l’Investissement

La notion d’investissement désigne dans son acception la plus étroite, une avance en capital fixe, c’est à dire l’acquisition à des fin productives d’un bien durable ou immobilisé : terrain, construction, équipements…

Mais au-delà de cette définition restrictive, l’application de la notion donne lieu à de multiples extensions. On parle ainsi :

  • d’investissement financier pour désigner une acquisition de titres (actions, obligations…).
  • d’investissement immatériel à propos de l’acquisition d’actifs incorporels (brevets, fonds commercial…).

De telles définitions sont fondées sur le contenu de l’investissement. Elles ne constituent pas une référence claire et rigoureuse.

Dans ce contexte, COHEN défini l’investissement comme « une avance immédiate de ressources monétaires destinées à susciter des revenus ou des réduction de charges monétaires dans le futur. »

Deux phases fondamentales du processus d’investissement se dégagent de cette définition :

- L’engagement de ressources immédiates

- Le dégagement de revenus futurs qui permettent la  reconstitution élargie des ressources engagés.

Ainsi, dans une perspective strictement financière, un investissement se décrit comme une suite de flux de liquidités, ou flux de trésorerie, échelonnés dans le temps. Ces flux représentent soit un encaissement soit un décaissement pour l’entreprise et peuvent être schématisés comme suit :

                  

 

  

    

 

  

                                                                                                                       

 

   

 

3. Les différents types d’investissement.

Les investissements peuvent être de natures très différentes, on en présente ici une classification traditionnelle :

  • Les investissements de remplacement et de modernisation : Ces investissements visent à remplacer des équipements vieillis ou obsolètes.
  • Les investissements d’expansion : Il s’agit des investissements contribuant au développement de l’activité de l’entreprise.
  • Les investissements stratégiques : Il s’agit des investissements résultant d’une option stratégique prise par l’entreprise.
  • Les investissements humains : Il s’agit des décisions de recrutement d’ouvriers, de cadre et de dirigeants. Cet investissement en capital humain n’apparaît pas au niveau du bilan.

4. Importance de la décision d’investissement.

Les décisions d’investissement figurent parmi les décisions les plus importantes que les gestionnaires ont à prendre. Elles s’inscrivent dans le cadre de la stratégie globale de l’entreprise.

Par opposition aux décisions financières à court terme, les décisions d’investissement à long terme sont la plupart du temps, difficilement réversibles et engagent l’avenir de l’entreprise.

Par ailleurs, la décision d’investissement influence et détermine dans une large mesure la classe de risque et la rentabilité de l’entreprise. Dans ce contexte le gestionnaire doit optimiser l’utilisation des ressources de l’entreprise de façon à n’accepter que les projets qui sont susceptibles d’avoir un impact positif sur la valeur de l’action.

 

5. Éléments constitutifs de l’investissement.

Financièrement un projet d’investissement se caractérise par une dépense initiale en capital appelée encore le coût de l’investissement, des entrées nettes de trésorerie ou cash-flows échelonnées sur toute la durée de vie du projet et une valeur résiduelle à la fin de sa durée de vie.

Ainsi, les composantes d’un investissement sont :

5.1. Le coût de l’investissement :

Le coût de l’investissement se défini comme l’ensemble des dépenses engendrées par la mise en œuvre d’un projet. C’est donc l’ensemble des incidences directes et indirectes que peut avoir un projet sur les liquidités de l’entreprise à la date initiale.

Ce coût d’investissement comprend :

  • La dépense d’investissement principale c’est à dire les fonds investis dans l’acquisition d’immobilisations corporelles (terrain, construction, matériel…), d’immobilisations incorporelles ( brevets, fonds commercial…) voire même d’immobilisations financières, pour leur montant hors taxes lorsque la TVA est intégralement déductible.
  • Les dépenses secondaires occasionnées par la mise en place de l’investissement (formation du personnel, frais de recherche…).
  • Le besoin supplémentaire en fonds de roulement occasionné par la mise en œuvre du projet. Sa mesure est assez difficile, mais la méthode du fonds de roulement normatif peut fournir une aide appréciable. Ce besoin supplémentaire est récupéré à la fin de la durée de vie du projet, puisque l’on considère que ce dernier est totalement arrêté : les stocks sont vendus, les créances clients encaissées et les dettes fournisseurs payées.
  • Le coût d’opportunité, correspondant à la valeur marchande du bien déjà existant dans l’entreprise avec une hypothèse de vente. Par exemple on disposait déjà d’un terrain et on compte y construire un projet, le montant de l’investissement devrait inclure les liquidités que l’entreprise aurait pu obtenir en vendant le terrain.
  • Les effets induits sur d’autres projets, c’est à dire si le projet en étude entraîne la cession de matériel obsolète, le produit de cette cession viendra en diminution du montant investi.

5.2. La durée de vie du projet :

La durée de vie d’un projet appelée aussi durée de vie économique correspond à la période pendant laquelle l’investissement est effectivement utilisé par l’entreprise.

5.3. La valeur résiduelle :

A la fin de leur utilisation, certaines immobilisations présentent une valeur résiduelle résultant soit de leur revente soit d’une ré-utilisation, qu’il convient d’évaluer par rapport aux dépenses entraînées par l’acquisition d’un bien de même type ou rendant des services analogues, et de la récupération du besoin en fonds de roulement.

On assimile donc, la valeur résiduelle à la valeur marchande de l’immobilisation à la fin de sa durée d’amortissement ou à la fin de la durée de vie du projet. Cependant, deux cas sont à envisager :

ü       La valeur comptable nette est égale à la valeur marchande.

ü       La valeur comptable nette est différente de la valeur marchande.

5.3.1. Valeur comptable nette = valeur marchande :

Dans ce cas la valeur de cession de l’immobilisation correspond à un encaissement qui augmentera le cash-flow de la dernière année.

5.3.2. Valeur comptable nette différente de la valeur marchande :

Deux situations sont à ce niveau possibles :

ü       La Valeur comptable est inférieure à la valeur marchande

Cette situation apparaît lorsque l’amortissement pratiqué est supérieur à la dépréciation réelle de l’équipement, ou à cause d’une augmentation des prix sur le marché. La cession dans ce cas va permettre à l’entreprise de récupérer une somme supérieure à la valeur comptable de l’équipement. La différence constitue un profit hors exploitation qui augmente le bénéfice imposable, un effet d’impôt se dégage ainsi sur cette plus value et constitue un décaissement pour l’entreprise.

ü       La valeur comptable nette est supérieure à la valeur marchande

Cette situation apparaît lorsque l’amortissement pratiqué est inférieure à la dépréciation réelle de l’équipement, ou à cause d’une diminution des prix sur le marché. La cession dans ce cas va permettre à l’entreprise de récupérer une somme inférieure à la valeur comptable de l’équipement, la différence constitue une perte hors exploitation soumise à l’impôt sur les bénéfices (lorsque l’entreprise est bénéficiaire pour l’ensemble de son activité).

5.4. Le cash-flow :

Le cash-flow peut être défini comme le surplus potentiel d’encaisse que l’entreprise retire sur une opération particulière (par exemple un investissement) sur un ensemble d’opérations (par exemple l’exploitation) ou sur l’ensemble de ses activités.

Le cash-flow d’un investissement est donc obtenu à partir de la différence entre les entrées et les sorties de fonds pendant une certaine période.

La notion de cash-flow apparaît comme un indicateur de résultat qui peut fournir un substitut au concept de bénéfice comptable. Cependant, on sait que le bénéfice tient compte des produits créés et des charges consommées, même lorsqu’elles ne se traduisent pas par des entrées ou des sorties de monnaie.

En particulier, le bénéfice est calculé après déduction des amortissements. Or ce dernier ne correspond pas chaque année à une sortie de monnaie.

Alors que le cash-flow prend en considération les seuls éléments monétaires donnant lieu à une circulation potentielle de monnaie. Il ne tient pas donc compte des amortissements, provisions et autres charges calculées mais non décaissées. Donc pour ces dépenses qui ne se traduisent pas par une sortie effective de fonds, uniquement l’effet d’impôt est pris en considération et est considéré comme un encaissement, qui viendra en augmentation du bénéfice imposable et par suite du cash-flow net.

 

Exemple 1

Soit un projet portant création d’une nouvelle usine, le coût initial est de 55000 DT. La durée de vie du projet est de 10 ans correspondant à la durée de vie des installations, sauf le terrain acheté pour 10000 DT dont la valeur sera récupérée dans dix ans. Ce projet laisse espérer des ventes annuelles de 20000 DT, mais entraînera des dépenses additionnelles de matière première (5000 DT par an) de personnel (7000 DT) et de frais généraux 2000 DT, le taux de l’impôt est de 35 %.

1/ Calculer le bénéfice comptable, puis le cash-flow annuel.

2/ Etudier l’effet d’une augmentation des ventes de 500 DT puis une augmentation des frais généraux de 500 DT sur le bénéfice comptable puis sur le cash-flow annuel.

 

Solution

1/

 

Ventes

 

20000

 

 

    - Matière première

 

5000

 

 

    - Charges de personnel

 

7000

 

 

    - Frais généraux

 

2000

 

 

    - Dotation aux amortissements

 

4500  

*

 

Bénéfice avant impôt    

 

1500

 

 

    - Impôt / bénéfices

 

525

 

 

Bénéfice après impôt

 

975

 

 

* (55000 - 10000) / 10

 

 

 

 

 

Ventes

 

20000

 

 

    - Matière première

 

5000

 

 

    - Charges de personnel

 

7000

 

 

    - Frais généraux

 

2000

 

 

    - Impôt

 

525

 

 

Cash-flow

 

5475

 

 

2/

* Si les ventes augmentent de 500 DT

 

  Bénéfice imposable = Recettes – Dépenses = 20500 – 18500  =

 

2000

 

- Impôt = Bénéfice imposable x Taux d’impôt = 2000 x 0,35 =

 

700

 

   Bénéfice net =

 

1300

Lorsque les recettes augmentent, le bénéfice net n’augmente pas du même montant (500) mais d’un montant inférieur (1300 – 975 = 325). L’impôt réduit donc le bénéfice de 500 x 0,35 = 175, soit l’augmentation des recettes x le taux d’impôt.

è A toute variation des recettes correspond donc, un effet d’impôt au niveau des décaissement.

* Si les frais généraux augmentent de 500 DT

 

  Bénéfice imposable = Recettes – Dépenses = 20000 – 19000    =

 

1000

 

- Impôt = Bénéfice imposable x Taux d’impôt = 1000 x 0,35 =

 

350

 

Bénéfice net =

 

650

Lorsque les dépenses augmentent, le bénéfice net ne diminue pas du même montant (500) mais d’un montant inférieur (975–650=325). Il y a donc un gain de 175 DT dû à l’effet d’impôt. Ce gain est en général égal à l’augmentation des dépenses x taux d’impôt.

è A toute variation des dépenses correspond donc, un effet d’impôt au niveau des encaissements.

Remarque : Pour les dépenses qui ne se traduisent pas par une sortie effective de fonds, exemple l’amortissement, uniquement l’effet d’impôt est pris en considération et est considéré comme un encaissement, qui viendra en augmentation du bénéfice imposable et par la suite du cash-flow net.